« François Champion est lui en milieu de flotte en compagnie de deux autres Pogo1 (Sandrine Bertho et Fabien Meyer). Auteurs tous les trois d’une belle trajectoire ils confirment que le Pogo1 n’est certes pas le bateau le plus rapide, mais qu’il tient toujours son rang en milieu de flotte et qu’il est tout à fait adapté à un projet amateur qui ne peut de toutes façons pas espérer terminer dans les premiers »
J7, le 9 octobre... Voilà donc une semaine que nous sommes partis de Madère, l'alizé est enfin rentré, d'abord un bon petit 15 noeud de Nord-est, et le voilà maintenant avec des rafales a plus de 25.
Le temps est beau mais pas très clair, un peu brumeux, visibilité assez mauvaise, des petits nuages pommelés parsèment le ciel, assez monotone.
La nuit a été intense, a fond la caisse sous grand spi dans les premiers surfs de fou qui n'en finissent pas, constament lancé a plus de 10 noeuds, impossible de se reposer dans ces conditions, un mélange d'excitation d'être en course, de pur plaisir de barrer son petit bolide dans ces conditions merveilleuses, un peu d'angoisse aussi de tout voir partir au tapis, quelques inquiétudes pour mon seul et unique pilote auto qui travaille énormement et puis il est difficile de desserer les fesses dans sa banette quand on sent les accélérations folles et le raffut qui va avec en pleine nuit noire...Petite pause bien méritée en fin de nuit, il me faut réduire et passer sous petit spi, j'en profites pour une paire d'heures de vrai sommeil et renvoi « le pti » vers 8h, des cigarettes sur les oreilles, des barres « MuleBar » plein les poches, un thermos de thé pas loin, chapeau-lunettes-crème solaire, une bonne playlist de musique calée dans le mp3 : voilà comment on se prépare a une longue journée a la barre...

Pendant ce temps dehors ca surf a bloc, quelque rafales me font sortir un peu pendant la meteo « in english » en attendant les classements. « Classement établi a 7h TU, pour les bateaux de séries... »

Les 2 jours qui suivent sont sur le même rythme : grosses bourres sous spi la majeure partie du temps entercoupées de pauses (affalage du spi) imposées par la fatigue et la faim, un départ en vrac, un changement de voile, un empannage ou .... le mal au fesse ! Et oui je vous passe le détail, mais l'humidité + sel + frottement + chaleur font des ravages et imposent des sessions rincage-séchage-crémage (genre Mytosil)- mise à l'air...
En dehors de ça, le moral tient bon même si c'est très dur physiquement, je suis devenu une machine a naviguer, j'ai l'impression que ma tête est vide de tout et ne pense qu'a la stabilité du bateau, a me demander si je tiendrais le grand spi, ou si je dois prendre un deuxième ris dans la grand voile...
Dans la catégorie « départ au tas mémorable », il faudra quand même noter, le 11 au petit matin un enfournement sauvage (plantage de l'avant du bateau en bas d'une vague en survitesse), l'étrave pourtant volumineuse s'enfonce, s'enfonce... jusqu'au pied de mat, le temps de perdre sa vitesse supersonique, l'arrière du bateau de lève dangeureusement, les safrans sortent de l'eau... ouhlala ! chaud ! Mais finalement le bateau s'arrête et se couche « normalement »...
Ce soir la j'arrive enfin sur l'archipel du cap vert, après mon cafouillage au canaries, je décide de passer loin des îles dans le passage le plus large et le plus proche de la route directe, je suis assez seul par la, je crois que la plupart passe dans l'ouest, soit pour une escale technique a Mindelo, soit pour se rassurer et y boire un coup si l'envie leur vient mais je n'y voit pas trop d'interet stratégique.
Je marche bien et j'ai maintenu ma place a la 33ème position, nous sommes les 3 pogo 1, sandrine a 4 Milles devant et Francois a 15 derrière...
Le vent molli et les conditions deviennent vraiment agréables glisse sous grand spi par 10 noeuds de vent, repos, rangement, ménage.... J'en profites pour ouvrir quelques petits mots gentils que m'ont laissé mes amis. Mes pensées voyagent instantanément vers eux et avec elle tout un lot d'émotions qui explosent littéralement, nostalgie... la joie d'être triste ! Tous me manquent beaucoup mais j'imagine déjà le bohneur de retrouver mes proches après cette aventure...
« Podorange, Podorange du 445 vous me recevez ?
Salut Fabien, te voilà réveillé... On va essayer de faire quelques images.
Ok super, Je pense que je vais profiter de mon empannage pour faire une petite pause ti-dej avant de renvoyer sur l'autre bord...
Ok , on essaye de se rapprocher, fais nous signe quand tu renvois »
J'affale donc le temps de me faire un bon casse-croute, puis vient le temps de la vacation VHF qui est un sacré divertissement aux coté de « Podo »: Poème, dicton du jour, quizz avec Caïpi a la clé...
Je me prépare a renvoyer et en avise mes compagnons, « Tu es sur d'etre bien prêt ? Tu t'es brossé les dents ? », dernier détail a régler donc et feu ! Ca glisse bien et j'essaye de me rapprocher mais pas moyen d'abattre suffisament, je les double d'assez loin et accélère progressivement au fur et a mesure que le vent monte, je suis desormais a l'ouest de Fogo, un immense volcan de 3000 m qui promet un sacré dévent. En continuant comme cela au sud je devrais tomber dedans... mais si loin que j'epère en être sorti. En attendant je profites d'une belle accélaration su le coté de l'île qui me booste littéralement dans une mer régulière, les plus belles moyennes que j'ai jamais faites, un pur régal, et facile a tenir cette fois ! Malgré les avertissement des collègues a la VHF « Fais gaffe, j'ai entendu que le dévent de cette ile pouvais aller jusqu'à plus de 100 milles ! », je me dis qu'il me suffira d'empanner si le dévent se fais sentir....

Ce n'est que le lendemain (le 13) que le vent revient, médium de NE, a la vacation, je suis 31ème, après être repassé 29 hier, je suis derrière sandrine et Francois m'a passé aussi... Décidément les îles c'est pas mon fort !
Devant moi il n'y a plus rien, plus de terre mais un gros « passage a niveau » qu'on appelle le « pot au noir », une épreuve dans l'épreuve, vu mon manque de préparation, je n'ai absolument aucune stratégie pour passer ça, et après avoir essayer de glaner quelques infos auprès des collègues a portée de VHF, je décide de faire simple, tout droit et plein sud dès que tu rentres dedans !
Drôle d'impression que de n'avoir plus de terre comme repère, juste un cap, une position et de l'eau partout... Ayant dèjà passer ce pot au noir, je pensais savoir a quoi m'attendre, de long moments de calme et de beau temps entrecoupés de bons petits grains... Je me trompais !
A suivre... et Bonne Année 2010 !