Hej ! Me revoila connecté pour vous livrer un nouvel épisode (l'avant dernier) qui fut une clé de cette transat : la traversée du "pot-au-noir"...
Je sais que vous attendez aussi quelques nouvelle du froid Scandinave, mais un petit résumé de ces mes début suédois viendra bientot, patience ! Sachez pour l'instant que tout va bien, il y a plein de neige, il fait parfois très froid (-15), plein de glace et que l'hiver ici est vraiment beau !
Stay tuned !
Le 13 octobre, 11ème jour de mer depuis Madère, il est 19h TU, ma position est 12°40'N / 26°20'W, il me reste un peu moins de 1800 Milles a parcourir, je n'ai donc pas encore tout a fait atteint la moitié de cette deuxième étape. J'ai trouvé mes compagnons de route, les numéros ont laissé place a des noms, ils s'apellent François, Marc, Sandrine, Gaetano, Yves... Aucun d'entre nous n'est vraiment un grand bavard accro de la VHF, mais les contacts sont réguliers, courts et chaleureux... on prend des nouvelles les uns des sautres, parfois a travers un relais. En ce qui me concerne je suis a la 31ème positions donc plutot derrière ce petit groupe après mon arrêt au stand dans le dévent de Fogo hier... Il fait extremement chaud, plus de 30°c a l'interieur de bateau aux heures chaudes. Mais cette journée est un pur bohneur, vent de NE force 3, ce qu'il faut pour faire une jolie moyenne autour des 7 noeuds sans forcer, et surtout aucun besoin de tenir la barre. Donc rangement, repos, cuisine, toilette, ménage, lecture, musique, pensées... Bref, pas le temps de s'ennuyer finalement au beau milieu de l'atlantique sous les tropiques, la vie est plutot belle mais il y a une petite apréhension : le pot au noir, cette zone que nous approchons nous inquiète, comment vais je réagir si je me retrouve scotché au même endroit pendant 2 jours ? Quel genre de grain ou d'orage terrible vais je rencontrer ?
Ce soir ca refuse un peu, je me décide a passer sous Gennak pour optimiser mon repos et en garder sous le pied pour le le « Poto », d'autant que c'est la nuit noire et que devant très loin le ciel pétille d'éclairs...
« François de Fab, tu me Reçois ?
« - Yes Fab, comment ca va ?
« - Impec après cette belle journée, mais tu vois comme moi devant ?
« - Je surveille ca depuis un moment, mais je crois que c'est très loin ce sera pour demain...
« - Ouais, surement, faut se tenir prêt, je vais passer sous gennak pour me faire une bonne nuit.
« - Quoi ? Tu déconnes, garde ton grand spi, tu vas pas laisser filer Sandrine !!!
« - Ahhhh je sais pas ...
« - Allez je compte sur toi ! On fait le bilan demain matin !
« - Ca roule, Bonne nuit
Et voilà, comment jours après jours on s'accroche... un grand merci donc a mon lièvre Francois en passant !
Le 14 octobre est une nouvelle journée plutot paisible, je suis desormais très proche de Gaetano que j'ai en visuel au loin sur mon avant babord. Francois doit etre vaiment tout proche sur Tribord...
Toujours sous gand spi mais ce soir ca se gate, devant nous se dresse un mur tout noir, un peu d'apréhension, on se tient prêt et on échange nos avis sur ce qui nous attend : affaler le spi avant ou pas, que faire contre la foudre...
Nous y sommes, ambiance apocalyptique de fin du monde, c'est noir et la pluie arrive, d'un seul coup le vent tombe complétement, méfiance... Le spi ne porte plus et traine dans l'eau, je l'affale.
Je cherche le vent mais il n'y en a plus un souffle, le génois est envoyé, je me prépare et met mon ciré. De violents éclairs grondent mais tout est calme...
Un étrange bruit sourd monte venu de nulle part... Un rideau de pluie, glaciale !
Le voilà, ça y est, c'et la guerre, moi et Roxane contre le pot au noir, c'est très fort.. le bateau se couche, la grand voile est choquée et je prend 2 ris en 15 secondes. Avant de me ruer sur la plage avant pour affaler le génois, ca souffle vraiment fort 30 noeuds ? Plus ? Sur la plage avant, c'est l'action, descendre vite ce génois qui claque avant de tout péter, la pluie est vraiment froide, les embruns paraissent brulants... étrange contraste.
Grand voile seule a 2 ris, je rentre quelques instants me mettre a l'abris... et alors que je suis sur le point de me faire une petite soupe pour m'en remettre, François m'apprend qu'il a déjà renvoyé toute la toile, ah le bougre ! Ok une fois de plus il a raison, de retour sur le pont il faut en effet se sortir le doigts du c... Ca a molli et il est déjà temps de remettre du charbon ! Bienvenu dans le Poto !
Après cette nuit agité, le lendemain (Le 15) est une nouvelle belle journée a glisser sous grand spi sous le soleil... Bizarre, on en discute et on commence a se dire qu'on a beaucoup de chance d'avancer comme ca à cette lattitude.
Le soir un nouveau grain approche, méfiance. Très menacant mais moins large, je pense que ça devrait passer à coté. Je garde le spi, barre et écoute en main, sur le qui-vive... Et me fait ceuillir violamment ! D'un coup, bateau couché, départ au lof, je choque, impossible de ramener le bateau... Affalage en catastrophe, le spi claque dans tous les sens, je choque l'amure, ca part violamment.
Bref, je dois finalement ramener mon spi au winch tellement c'est fort et tant bien que mal j'arrive a le ramener, Ouf ! Je me demande comment c'est possible qu'il soit encore la et entier, je me remet de mes émotions, laisse passer le grain... et renvoi mon spi !
Une bonne nuit cette fois, presque une grasse mat', je me réveille tranquillou et me prépare un petit café en musique. Le vent est globalement de plus en plus faible mais toujours la et de secteur est, on ne va pas s'en plaindre, d'ici une centaine de mille on devrait être sorti de la... sans trop de mal si ca continue comme ca ! Je met enfin la tête dehors, et découvre à quelques encablures sous mon vent un mini ! C'est François ! Décidément l'Atlantique est tout petit !!! « François, met la bière au frais, on déjeune ensemble a midi !!! ». La vacation nous place a la même distance du but (1380 milles), devant nous a 3 milles il ya Sandrine et a 10 il y a Marc...
Alors que notre écart latéral se réduit tout doucement, devant nous se dresse un nouveau phénomène... On pourrait appeler ça un grain, mais c'est trop gros... Un front ? Non, c'est trop dense, trop noir... Quoi que ce soit, c'est préoccupant et je ne vois pas de stratégie qui m'incite a aller m'en écarter a gauche ou a droite. Ca n'a pas l'air drole, mais il va falloir se résigner a rentrer dans ce truc... en esperant le traverser rapidos !
On approche, cote a cote, bataille rangé, le 228 et le 445 contre le gros nuage... Ca fraichit doucement et refuse. Prudent, je roule le gennak, envoi le génois, et borde tout ca pour garder le cap. François suit le vent et tourne de 90° a droite... A t'il raison de chercher a contourner ce monstre ? Aucune idée mais je ne vois pas de bonne raison qui m'incite a le suivre, j'enfile mon ciré et fonce droit devant... Soudain il fait une manoeuvre encore plus surprenante : affalage de son code 5 et demi tour... il passe dans mon arrière pour aller chercher la gauche du nuage cette fois.... Bizarre...
« François de Fab, t'as peur du nuage ou quoi ?
Ouais fab, pas envie de rentrer la dedans, ca va être la grosse molle
bon ben écoute moi je préfère la jouer tout droit, on fera les comptes plus tard...
Ca roule A+et bon courage avec ce merdier »
Le rideau de pluie approche.... tout fermer vite fait... Douche froide ! Plus de vent plus de visibilité, il fait hyper sombre en plein après-midi... Quelques heures d'énervement intense, trempé, le vent qui tourne, s'éssouffle, la bome qui bat et tape dans tous les sens... Et moi qui m'énerve dans tous les sens, a gueuler seul sur mon bateau, je n'avance pas d'un poil : le moral en prend un sale coup. Finalement, le vent se lève, de sud, la ou j'aimerais aller pour sortir de ce merdier... Ca commence a rentrer, il faut changer de voile d'avant, je suis tellement démotivé et exténué que le génois trempé reste un long moment en vrac dans le cockpit...
Allez il faut reprendre le dessus, ranger, matosser, optimiser son cap... Le vent est vraiment fort desormais, GV a 2 ris et je pense a prendre un ris dans le solent. Le ciel est très sombre, on est sous un énorme nuage avec néanmoins des zones un peu plus claires et clémentes qui donnent lieu régulièrement a des bascules impressionnantes (cad changement de direction de vent). A chacune d'entre elle il faut réagir, en général trop tard, quand toutes les voiles sont à contre et que le bateau a viré intempestivement, changer de bord et surtout MATOSSER ! Déplacer tout ces foutus bidons de flotte, ces sacs de bouffe et autres voiles, mouillage... C'est épuisant. A chaque fois se reposer la question : est ce le bon bord ? Sur tribord je me retrouve régulièrement a 130°, et sur babord a 270°, alors que je voudrais faire du 180-200, mais justement tout est la : 180 OU 200, optimiser se descente dans le sud pour sortir de cette zone ou privilégier la route directe un peu plus a l'ouest ?
Les conditions sont affreuses, nuit noire, mer hachée, pluie forte continue et glaciale,houle complètement desordonée, vent parfois très fort, plus de 35 noeuds et surtout en pleine face, la vitesse fond ne dépasse pas les 4,5 noeuds, soit 3 noeuds au maximum sur la route directe, tirer des bords au milieu de l'Atlantique, a plus de 1000 milles de toute cote, quelle horreur !
Je cherche un peu de réconfort coté VHF mais ce n'est pas la joie, il semble que certains on le moral encore plus atteint que moi... Et puis des mauvaise nouvelle du coté de Sandrine, son bateau aurait été frappé par la foudre, ca a l'air d'aller pour elle mais personne n'arrive vraiment a la contacter en direct, on arrive juste a capter gaetano qui est proche d'elle... Stressant... Il n'y a que François « le warrior des mers » qui se sent chez lui « C'est cool ca me rappelle la manche ! »...
Je sent le bateau soufrir et m'inquiète, pas un bon endroit pour démater, au milieu de rien, je vais péniblement prendre un ris dans le solent, je fait tout de travers, entre fatigue et énervement, je ne suis pas très beau a voir, il vaut mieux être en solo dans ces moments la...
Un brin de lucidité me fait dire qu'il vaut mieux désormais privilégier l'ouest que le sud, je décide donc de rester babord amure tant que le cap reste inferieur a 270, j'en avise mes collègues qui ne semble pas du même avis et insistent sur tribord... « On fera le bilan a bahia la semaine prochaine autour d'une Caipi ! »
Ce calvaire durera 24 heures, a « jouer » avec les bascules de vent, a esperer a chaque fois que cette fois on est sorti... Et puis ce soir du 17 octobre, vers 17h TU par une latitude de 4°40' N je sors enfin du pot au noir, le ciel se dégage, le vent se stabilise 15 noeuds de Sud-est... Cap au 210, sur Fernando de Noronha a 500 milles de la, j'optimise les réglages, tout est matossé a fond sur babord, et même sur le pont : Gennak, spi, linge sale, poubelles... Tout ! Avec ce rayon de soleil, la musique et la bonne humeur... une bière peut-être ? Non elle ont toutes explosées !
Coté classement, je suis passé de la 31ème a la 23ème place, un passage difficile mais pas inutile, Francois est a 20 milles derrière, Sandrine à 40 et Marc me Talonne, en Bref, je suis passé devant tout mon petit groupe ! C'est la fête !
Devant moi c'est la dernière (longue) ligne droite, une chevauchée de 1400 Mille sur une allure plus serrée qui s'annonce moins confortable, un grand test d'endurance... Pour l'instant je choisi de ménager le bateau et de récupérer, il y a quand même quelques « étapes »: l'équateur, Fernando de Noronha (marque de parcours), puis Recife et un bon bout de Cote Brésilienne... Mais ça c'est une autre histoire ! A suivre !